NOVEMBRE 1591.                            189
proche de l'execution. A quoi le president Brisson res­pondit en ces termes, comme eux mesmes m'ont conté : a Mes amis, je ne doute point que tout ce que vous « m'avez dit ne soit vrai, et encores pis. Mais pour y « donner ordre il est bien tard : car, pour vous dire, « je ressemble à ces chiens qui sont entrés bien avant « dans l'eau, et sentans qu'ils se naient s'en voudroient « bien tirer, ou gangner quelques bords s'ils pouvoient; « mais ils ne peuvent, car le fort de l'eau les emporte: « si bien qu'en nageant tousjours, à la fin ils se naient. « Aussi moi, pour vous en dire franchement, je fais « ce que je puis «n ceste tempeste, et ai fait tousjours « ce que j'ai peu, pour.me tirer à bord, et y mettre les cc autres; mais nous y sommes entrés trop avant pour « en sortir : au moins moi, qui sens bien que je me « naie et ne m'en puis sauver, si non par une sciale « grace et miracle de Dieu. »
M. Poussemothe, advocat au parlement de Paris, l'alla trouver aussi le jour mesme pour l'en advertir, et lui en dit autant que les autres ; lequel M. Brisson remercia, car il l'aimoit et croiioit. Il avoit mené avec lui un nommé Haschette, bonnetier demeurant sur le pont Saint-Michel à Paris, que le president Brisson congnoissoit pour homme de bien et bon serviteur du Roy, et au surplus qui n'avoit gueres de Jaux advertis-semens; lequel lui confirma les advis qu'on lui avoit donnés., et lui dit encores quelques autres particularités notables qu'il avoit aprises, et qui se trouverent veri­tables, sur ceste entreprise des Seize.
Finablement, sur le soir bien tard, le vinst trouver maistre Jean Prevost, curé de Saint-Sevrin, son bon ami, qui l'advertist que les Seize avoient pris les armes,
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